Le zoom littéraire du 1er juillet n’était pas un zoom mais une fin d’après-midi et soirée chez Louis qui a eu la gentillesse de nous recevoir.
Compte-rendu de Nicole
Notre café littéraire est pour la deuxième fois en promenade pour une réunion de fin de première période. Nous espérons maintenant nous réunir « in vivo », soit dans un salon, soit un café, soit un jardin selon le temps.
Lundi dernier, nous avons assisté au spectacle des Bassins de Lumière : Les Impressionnistes. Nous étions 9 adhérents, nous pourrons recommencer !!!
Merci à Louis d’être notre Amphitryon, aujourd’hui, il nous reçoit magnifiquement dans son jardin, et sa véranda. Nous sommes une douzaine de lecteurs appartenant à Passerelles. Louis, Michèle et Dominique, Mauricette, Marie-Françoise, Marie, Nadine et Arlette, Francine, Jean-Jacques et Robert qui n’aimait pas Zoom. Anne-Marie n’a pas pu venir, elle adresse ses amitiés à notre groupe. Des messages de Renée, Marie-Do, Monique et Bernard qui regrettent d’être indisponibles.
Après quelques rafraichissements, nous pouvons nous asseoir et partager ce moment littéraire.
Il fait un peu froid pour rester dans le jardin que nous avons admiré, après un léger goûter, Nicole voudrait nous inviter à lire pendant les vacances, un livre original, écrit par un jeune auteur perpignanais d’une quarantaine d’années, Cyril Massaroto. Ses premières œuvres sont toutes éditées chez XO, qui manage bien ses écrivains. Il est diplômé de Sciences économiques et fut professeur quelque temps. En 2001 son premier roman est très apprécié du public : « Dieu est un pote à moi !». D’ailleurs, il continuera à l’impliquer dans ses plusieurs de ses écrits !
C’est de « Quelqu’un à qui parler »2017, que j’aimerais vous entretenir. L’humour fait irruption dés les premières pages du roman. C’est brillant, incisif, c’est le discours intérieur de notre héros Samuel, 35 ans, au soir de son anniversaire. Le premier chapitre dit tout sur notre héros dans une situation douloureuse, seul pour cette fête avec deux chaises vides et deux bouteilles de champagne… Toutefois sous l’humour paraît une souffrance, plutôt une mélancolie car Samuel ne pleure pas sur soi !
L’intrigue se noue sur un hasard, le seul numéro de téléphone dont se souvient Samuel, (il vient de casser son smartphone,) est celui de la maison de son enfance, à huit chiffres…. Enfance douloureuse, silencieuse, retenue…. Il ose appeler après tant d’années ! …et une voix d’enfant répond : « Je m’appelle Samuel – moi aussi ??? » Ce début est prometteur, on ne peut plus quitter le roman. Mais on ne comprend pas ce qui se passe : que de conjectures….
Dans les chapitres suivants, il explique sa situation, son inertie, sa mélancolie qui le privent de tout élan à cause de cette enfance. Pourtant il ne peut pas se plaindre puisqu’il a retrouvé une sorte de famille et de vie douce auprès de ses voisins, un couple de personnes âgées qui le considèrent comme le fils qu’ils ont perdu ; et chacun est fidèle à l’autre, ils dînent tous les soirs ensemble et s’apportent l’affection nécessaire à leur équilibre. Son patron semble avoir une attitude semblable, amicale et confiante au moins en apparence. Cette vie pourrait durer très longtemps, sans trop de douleurs, mais il se sent un peu englué…
Presque tous les jours il téléphone maintenant au jeune Samuel qui lui ressemble, qui a les mêmes références que notre héros, comme s’il revivait sa jeunesse au travers de la voix de l’enfant de dix ans…Et cette intrigue devient dominante dans sa vie… Elle l’interroge, l’inquiète non pas pour lui-même, mais pour cet enfant qu’il voudrait aider à ne pas vivre les drames de son passé.
Se posent donc des questions originales : 1- les confidences qui s’échangent entre les deux Samuels peuvent-elles permettre à l’enfant de changer le cours des choses, ce qui pourrait changer aussi l’avenir de l’adulte ? Certes il ne peut changer la mort de sa Maman et les désespoirs du fils et du Père. Mais des détails pourraient se modifier : Une cicatrice sur le visage de l’adulte qui l’oblige à porter une énorme barbe, pourrait-elle disparaître si l’accident avec le Babyfoot ne se produisait pas ? L’idée du changement physique peut être un début d’évolution pour cet homme qui ne se trouve pas attirant. 2- Les attentions de Samuel adulte pour son personnage d’enfance montrent une douceur en lui, une empathie qu’il ne se connaissait pas, n’ayant eu ni frère, ni sœur. Il pose inconsciemment l’idée que le changement est possible. La « fatalité » qui figeait sa vie dans le présent, car tous les malheurs que son enfance recélait ne pouvaient provenir que de lui ? cela pourrait-il s’atténuer un peu ? Il n’était pas coupable de naître, même si sa mère était tombée malade au même moment.
3-Un incident se produit qui va lui plaire, car cela pourrait aussi changer l’avenir du petit Sam. Dans l’entreprise dont il ressent la routine, une délégation de commerciaux chinois vient négocier des contrats, et Li-Na, une charmante petite chinoise doit rester en stage pour quelques mois. Il est nommé homme de confiance et superviseur de la stagiaire. Toutes ses propositions d’aide, de sorties, de travail sont dédaignées par la jeune chinoise insensible et déjà francophone. Elle travaille constamment, se nourrit peu et ne se donne aucune liberté. Samuel qui la trouve agréable, n’ose plus intervenir malgré son attirance.
Ses parents de substitution s’en aperçoivent mais restent silencieux. Sa vie se modifie grâce aux échanges téléphoniques avec le petit Sam. Ce dernier pousse notre héros de 35 ans à s’ouvrir à une autre vie, et, le petit Sam s’intéresse à une vie dont il pourrait bénéficier plus tard ! Ce « jeu de miroir » est intéressant pour le lecteur.
Mais chacun reste sur ses positions. Que faut-il pour que Samuel veuille vraiment changer de vie ? Li-Na est surement une clef.
Ce livre n’est pas une romance, ce n’est pas une étude de comportement, l’analyse n’est pas ennuyeuse puisque c’est le travail intérieur du héros de « Quelqu’un à qui parler. »
Je vous laisse trouver dans ce livre XO, le dénouement qui n’est pas immédiat.
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Faire un retour sur ce que nous sommes, dans notre vie, peut être utile : on peut se dire que « Changer, c’est accepter de se mettre en danger pour atteindre certains objectifs. » Et une fois que l’élan est pris, on ne sait pas trop où il nous mène… Peut-être les freins préexistants, efficaces pendant des années, nous poussent à attendre, à voir…Parfois l’élan peut les déborder ! Et c’est le risque du « quoi qu’il en coûte ! » Cette notion apparaît dans l’adage : « brûler ses vaisseaux » ou se saborder, mais alors le changement est énorme, il confine à l’anéantissement, du moins on se fait peur…
Comment poser des limites ? Doit-on le faire ? A quel niveau ?
Le changement confine toujours au « Pari » sur l’avenir : quels enjeux, quels acteurs en cause, quelle confiance avoir en soi et dans les autres ?
Pourtant, si le changement peut s’accompagner de confiance en soi et dans le ou les partenaires, cela crée souvent la réussite. Les freins que l’on installe peuvent être perçus comme des rejets qui brisent la confiance espérée. Il en résulte une rupture possible qui laisse les acteurs sur leur échec, leur amertume, le désordre.
Comment mettre en place des risques mesurés ?
Cela suppose de se connaître assez intimement ; on peut analyser ses comportements habituels, par exemple beaucoup de personnes cherchent des partenaires un peu semblables, parce qu’elles savent ce qui se produira… ! Si la première relation est un échec , les suivantes peuvent-elles réussir ?
Comment fonctionnent les processus de changement en nous ? changeons-nous souvent de travail, de lieu de vie, maison ou autres, de lieu de vacances, de partenaire, ou d’ami-e-s. ?
Cette notion de « rythme » peut nous en dire beaucoup sur nous-même ; sommes-nous dans l’équilibre, dans l’instabilité, dans l’impossibilité de se décider (proscratinisation).
Ces prises de conscience sont utiles pour gérer l’idée de changement ou de résistance à la nouveauté. Mais tout cela, vous le connaissez très bien…
Une discussion s’ouvre : Mauricette, Louis s’appuient sur leurs expériences et leurs lectures.
Explication moderne : Le microbiote, constitué par les divers habitants de l’intestin ; les bactéries de la flore intestinale conditionnent nos comportements de façon aussi déterminante que le cerveau. En cas de déséquilibre, les maladies ont porte ouverte : non seulement les ballonnements, l’obésité, douleurs abdominales, mais aussi anxiété, troubles du sommeil, stress…
Le microbiote est un déterminant de nos défenses naturelles, donc de notre santé.
Explication plus classique : Le rôle des parents et celui de l’environnement ont une large part dans l’équilibre des enfants et des adolescents : cela peut s’entretenir par l’affection, des entretiens avec des personnes attentives aux autres, une bonne confiance dans la relation au sein du groupe familial ou amical. Se souvenir que l’Inné et l’Acquis sont des repères un peu simplificateurs. Tout est plus complexe dirait Edgar Morin. ( Boris Cyrulnik et Françoise Dolto aussi !)
Nous sommes tous impliqués dans ce type de recherche. Nous pourrons en reparler.
Passez un très bon été. En septembre nous nous retrouverons.