Café littéraire du 08/04/2024 📜📚

Beaucoup d’activités dans les deux semaines passées, cinéma, réunions, calendrier pour la fin de l’année semestrielle. Certains de nos amis profitent du printemps, des vacances autour de Pâques et ils voyagent : cela nous prive de Aurore, Sylvie, Monique, Michel, Jean, Jacqueline ; les pollens très importants nous privent de Marie Josée, Jacqueline, Renée qui nous ont donné des nouvelles. Merci à Marcel, Louis, Isabelle, Noëlle, Ida, Marielle, Marie, Evelyne qui rejoignent Nicole.  Merci à tous, nous vivons ensemble intensément ces moments d’échanges et de réflexions.

Nous parlerons des films, dans un premier temps :

 Sortie à l’Utopia, prévue et organisée par Isabelle, plus de douze participants l’ont rejointe pour voir : « Il reste encore demain » un film Italien de Paola Cortellesi 2023. Un très bon scénario qui est émouvant, actif et plein de rebondissements qui captivent constamment. Très apprécié en Italie, il est programmé depuis plusieurs semaines à Bordeaux. Il donne de l’enthousiasme mais ne peut être raconté, nous dit Isabelle. Merci à l’animatrice du Ciné-Passerelles de prévoir chaque mois une sortie en groupe, cela nous réveille.

C’est Ida qui a créé une « sortie cinéma » inopinée, pour voir un film resté discret « La nouvelle femme » écrit et réalisé par Léa Todorov, 2023. Présenté en Italie, puisqu’il montre Maria Montessori avant qu’elle ne devienne La Montessori, il est resté discret ; d’autres réalisations sur le même sujet ayant drainé une forte affluence. Sur quelques années de l’entre-deux guerres, cette jeune femme qui est docteur en médecine, souhaite faire une expérience d’éducation sensorielle sur des enfants un peu délaissés et jugés idiots, imbéciles, déficients. Expérience courageuse, mais reconnue comme ingrate, c’est peu dire, par les spécialistes masculins. Un film raffiné, sensible, produit par la fille du grand Tzvetan Todorov, linguiste, critique littéraire, sémiologue, essayiste d’origine bulgare. Léa Todorov est fille de Nancy Huston après un deuxième mariage de son père en 1981. C’est un environnement artistique et humaniste qui transparaît dans cette première œuvre filmique. A voir absolument. Merci Ida de nous avoir alertés, nous étions cinq amateurs.

Marcel a lu un livre recommandé par Aurore Rovani : « Les aventures de l’infortuné marrane Jean de Figueras » de Jean-Pierre Gattegno, écrivain juif, qui a écrit sur les difficultés de l’écriture. « Etre un juif de Salonique », Une encombrante judéité », et onze romans policiers. Il est né à Brive en 1944, d’un père ottoman et d’une mère grecque. Plusieurs films sont tournés en adaptation de ses œuvres par de remarquables metteurs en scène : JJ Beineix pour « Mortel Transfert »2001, F.Girod,  etc.

C’est un livre d’aventures picaresques, sur fond des drames causés par l’Inquisition, en Espagne. Au XVIIème siècle, la Contre- Réforme est menée par l’Inquisition et les marranes qui ont renoncé à leurs croyances, juives ou musulmanes, sont jugés et brûlés sur le bûcher.  Juan est envoyé dans un Collège Catholique pour échapper à cette menace : il va y apprendre tous les vices et les sévices que l’on peut craindre. Au bout d’un an, il s’échappe mais il ne retrouvera pas sa famille sévillane, condamnée ; et lui, sera mené par le hasard des rencontres à travers le pays et pendant un temps bien long.  Marcel revient sur Torquemada (1420- 1498) qui a dirigé l’inquisition et ses atrocités ; près de 80 000 morts en 14 ans.

Aux lectures du roman s’ajoutent nos commentaires sur les religions, une conception humaniste de l’homme, la place d’un créateur (?) ; Louis évoque Saint-Augustin et cette phrase étonnante : « Le temps a été créé avec Dieu et le monde ». Les recherches qu’il a faîtes pour ses interventions sur le Cosmos et l’Energie l’ont amené à se poser ces questions métaphysiques et nous le suivons facilement dans ses questionnements. Marielle est intéressée, elle n’est pas seule. Une sorte de jeu intellectuel s’engage, le présent n’existe pas puisqu’il passe constamment…Le futur non plus puisqu’il n’est que virtuel, et le passé n’est plus… Mais une petite voix nous dit : « Pourtant on a des traces, les objets, ce que nous sommes dans l’instant actuel… » ! et Louis conclut « L’univers évolue, se complexifie constamment, et nous ne sommes rien en face de lui…Y-a-t-il un monde autre que le matérialisme ? » ; et le négationnisme n’apporte rien. Je crois que c’est Noëlle ou Marielle qui cite Heidegger « Etre et temps ».

 

Nous respirons un grand silence, puis Nicole parle de la mission que lui a proposée Evelyne : parler du livre de Valéry Puertas : « La maison de Garance » oct. 023 ; cette écrivaine est une relation amicale.

Valéry Puertas, comme d’autres écrivains qui écrivent beaucoup avec succès, Musso, Lévy particulièrement, a choisi de faire des études de littérature dans un centre de formation à l’écriture, comme il y en a beaucoup actuellement. « La maison de Garance » est son troisième roman et le plus récent. Elle écrit bien, de façon claire, efficace, avec des notes sensorielles, émotionnelles, de l’audace, un féminisme volontaire. Toutefois je me demande si elle a écrit un roman, œuvre de fiction par définition. C’est pourquoi je me permets quelques remarques.

Son projet est défini à la 4ème de couverture : ( lecture). L’introduction présente un personnage important du couple principal : Estelle, puis Frank, leur situation, elle présente un cas d’amour fou, répétitif, journalier. La description est tendre, mais est-ce érotique ou provocation ? pour le lecteur ? aussitôt le chapitre 1 vient démontrer la gestion d’une journée de l’Aide familiale au domicile du soignant. Frank a choisi de travailler avec son épouse qui est nourrice professionnelle.

C’est tout un quartier qui est étudié par l’autrice, dans une vie de groupe qui semble moderne par le langage sans façon des partenaires, chacune est décrite sincèrement de façon factuelle :  le barbecue, les confidences de chacune des amies d’Estelle et de Frank sont au menu du vendredi soir ; et même les réflexions intimes sur chacun et chacune. C’est parfois bienvenu, et amusant. Mais au fond, il y a un certain sentiment d’ennui ou de recherche d’un plus… et c’est là que le diable se faufile. « L’ennui naquit un jour de l’uniformité… » dit La Bruyère.

« Garance » est un mot mythique, Arletty le prononce sur le pont dans le quartier de la Bastille, souvenez-vous, en face de Pierre Brasseur et Jean louis Barrault dans « Les Enfants du Paradis de Marcel Carné. C’est comme un nouveau monde qui paraît, et dans le livre aussi.

 Je vous laisse le plaisir de lire le livre.

Est-ce un roman ? l’autrice a un projet moral, elle le souligne dans la 4ème de couverture. C’est donc une sorte de démonstration, une leçon de vie, peut-être une étude de cas sociale.

Réactions de nos lecteurs et lectrices : * En 127pages, il est difficile de faire vivre une dizaine de personnages aux prises avec un évènement qui va modifier plusieurs vies, ou leurs parcours personnels et sociaux.

*L’évènement en question est assez classique de la littérature, de Tristan et Iseult, à des œuvres modernes comme « Belle du Seigneur » de Albert Cohen 1968 ; « Tendre est la nuit » de Scott Fitzgerald, 1934 traduit en 1985 en Français.

* Pour tout le groupe, ces œuvres sont majeures sur le même thème que « La maison de Garance ». Toutefois, l’extrême soin de l’écriture, la finesse de l’analyse, le refus du jugement sur l’expérience vécue, enfin un travail de ciselure pour décrire les démarches de chaque membre du couple et de son proche environnement, en font un trésor littéraire.

Nous ne sommes pas dans l’exercice de comparaison, mais il y a des règles à suivre, pour lire et prendre plaisir à percevoir les desseins de l’écrivain. S’ils sont trop visibles, schématiques, nous quittons le roman ; s’il n’y a pas de magie, le lecteur n’est pas transporté ; l’audace est parfois bien venue, mais la provocation est mesurée, sinon elle a une visée commerciale, accrocheuse. C’est pourquoi on conseille, par exemple, de n’écrire l’introduction que bien après avoir écrit l’ensemble du récit. Elle doit attirer vers le mystère, la découverte, l’attachement…

A partir de nos lectures, j’ai cherché quelques règles qui nous aideraient à mesurer notre plaisir à lire ou à écrire : Le lecteur est attiré par l’introduction du livre, certains d’entre vous ont admiré le prologue ou introduction de certains « romans »

  • L’image du la femme suspendue par son parachute dans le froid glacial de l’hiver, morte ; par Cormic MacCarthy, dans « Le Passager ».
  • Le reflet dans la vitre de l’appartement de Ritter, personnage de « Boussole », de Mathias Enard qui, en fait, regarde le soir tomber, son voisin qui promène son chien dans la rue, à Vienne.
  • De la lecture de Mélissa Da Costa, « Les femmes du bout du monde », je me souviens de la déception de Marcel, disant « On se demande bien pourquoi cette autrice a du succès, c’est mal écrit…( A lire !!!!)

En finissant cette réflexion, Isabelle nous fait partager des titres de romans qu’elle lit actuellement et qui lui plaisent autant comme romans d’apprentissage, que fiction poétique ou musicale :

De Akli Tadjer, trois titres coordonnés en Saga : « D’amour et de guerre, »2021 ; « D’audace et de liberté »2022 ; « De ruines et de gloire »2024.

De Jean Mattern : « Les eaux du Danube », une délicieuse balade dans la ville de Sète. Fév.2024.

De Christian Gailly : « Dernier Amour » ; « Les oubliés ».                                       

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Le roman a pour rôle de sortir du réel, ou des situations concrètes de la vie de tous les jours. Mais ce n’est qu’une remarque de ma part.

Quelques idées pour ceux qui aiment écrire….

I – Recherches : s’organiser pour l’écriture d’un roman.

1 – un plan préalable :

Quoi : de quoi s’agit-il ?  Préciser le projet : fiction, réel, souvenir, rêve, fantasme ;
Qui parle, de qui, personnages, un ou plusieurs, qui sont-ils ?
Comment, quel style, souvenirs, création, policier, sentimental, apprentissage.
Avec quoi, le décor, l’action, les événements, passé, présent ou fiction ?
Quels projets, est-ce pour soi, pour des lecteurs, des jeunes ou des adultes,
Anticiper des difficultés, donner des conseils, des avis. Prévenir ? (Prendre des notes)
Faire plaisir, se faire plaisir à moi, aux autres.
Choisir un milieu, une intrigue, des personnages, des événements, des rôles, (on commence à écrire)

2 – Faire un scénario : ce qui va permettre de trouver des personnages, une histoire, des événements, et une issue.  Un titre ou une série de titres au fur et à mesure…

3 – A quoi je vois que j’ai atteint mes objectifs. Sur le scénario. Sur l’intrigue, sur les personnages et leur psychologie…

4 – Faire des recherches, des approfondissements sur le réel qui est l’environnement ;

5 – Le style, l’adapter aux objectifs, aux divers personnages, rechercher des images, une atmosphère, ou des atmosphères.

6 – Comment je me positionne dans le roman, qui suis-je ? mon rôle ?

<Fabriquer un conte pour tester ; Une nouvelle ? une chanson, un tableau, un poème selon les sens les plus en éveil… >

II – Définir les types de travaux d’écriture selon leurs objectifs et leurs styles.

Le mot roman, recouvre de multiples réalités qu’il faut repréciser.

La fiction : une création de l’imagination, de l’imaginaire, rêve, fantasme, illusion.
L’essai : Genre argumentatif proche de la réalité, et rejetant tout ou partie de fiction.  Il est écrit en prose ; il repose sur l’observation de faits, sur une analyse de l’auteur qui présente dans ce cas son opinion. Il est étayé par des arguments, des exemples tirés de sa propre expérience. Son but est de soutenir un raisonnement, convaincre un partenaire sur un point de vue.
Le récit : c’est rapporter par oral ou à l’écrit, un fait, une situation, une aventure, une intrigue.
Le conte : est une narration comme le récit écrit.
Le roman : une fiction narrative.
L’apologie : narration à visée morale., chaque élément correspondant à un contenu abstrait.
L’allégorie : récit, narration mettant en œuvre des éléments concrets
La biographie : récit de la vie du biographe ou d’un personnage célèbre.
La chronique : récit à visée historique.
Le mythe : récit légendaire à visée universelle et souvent explicative.
La légende : récit ancien ou remontant à un passé qui reste encore en mémoire collective.
La chanson de gestes : récit plus ou moins complexe, de chants ou chapitres relatant des faits d’armes d’un personnage illustre.
L’épopée : récit de faits exceptionnels, ou d’aventures présentées comme exceptionnelles, vécues ou attribuées à la vie de personnages illustres ou légendaires.
Le Journal : récit historique assez précis souvent personnel.
Les lettres ou épitres : récit ou conversation plus ou moins intimes entre deux personnes communicantes.
Etude de cas : écrit plutôt professionnel sur un sujet d’étude, projet ou problème, présentant un historique, une problématique, un ou des développements, une conclusion. (Dissertation).

Bien sûr, la conclusion et l’introduction sont composées en fin de réalisation.

Pardonnez, je vous prie, ce point de vue didactique, dans notre recherche du plaisir de lire et de la nouveauté. C’est peu fréquent, mais utile dans notre évolution.

Nous avons encore échangé en prenant le thé pour retrouver nos vies particulières.

Merci à tous, nous nous retrouvons pour le café littéraire après les vacances, le 29 Avril 24 à 14h à l’Ermitage.

Auparavant nous partageons le Ciné-passerelles du 24 Avril , à l’Utopia : «  Le jeu de la reine »

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