Compte-rendu de Nicole du zoom du 17/05
Chers ami-e-s,
Nous étions peu nombreuses, mais nous étions très heureuses de partager nos lectures et nos idées pour commenter. Jean-Jacques est venu nous dire un petit coucou et nous prévenir qu’il avait terminé le livre de Joël Dickers présenté la semaine dernière : « L’énigme de la chambre 622 », livre de détente, bien écrit, mais assez rapidement composé. Merci à Jean-Jacques de nous avoir accompagnées, un moment.
Marie et Francine nous ont rejoints et nous avons commencé par les projets que nous mettons en place pour le mois de juin et les débuts de la nouvelle organisation de Septembre. Nous attendons les réponses de nos invités, cela ne saurait tarder.
Le 14 juin à 18h30 nous serons avec notre grande amie Anne-Marie Cocula, par Zoom.
Et peut-être nous nous organiserons pour faire une réunion amicale chez Louis Jacques le dernier lundi de JUIN le 21 ou le 28 selon vos avis. Après nous prendrons quelques vacances.
C’est Francine qui nous parle d’un livre dont nous connaissons l’écrivaine, Karine Tuil, le livre date de 2003 « Tout sur mon frère » ; nous connaissions déjà « L’invention de nos vies de 2013 ». Deux frères dont les parents sont des intellectuels, la maman est professeur de Grec et le père a un poste important, mais leur façon de vivre en banlieue reste simple. Vincent est le narrateur qui observe son frère Arno : Vincent n’aime pas les livres, et pourtant il est très capable de réussir matériellement. Il devient Trader, choisit le luxe, la cocaïne, les relations de prestige. Sa compagne est trader également, capricieuse, superficielle comme lui. Son frère est déprécié, sa façon de vivre, son apparente stabilité. Pourtant tous les deux sont confrontés à un problème familial, le père doit entrer en EHPAD et ce n’est pas simple. Les deux frères sont sensibles aux souvenirs d’enfance qui les rapprochent et en même temps ils sont différents, chacun pense avec ses critères, ses habitudes. Ils ont du mal à se rencontrer.
e livre est intéressant car il est centré sur les relations au sein de la famille, Francine se passionne pour ces questionnements, les façons de réagir, le rôle des femmes qui est stéréotypé. Elle les perçoit comme « chosifiées ». Le luxe est un révélateur de la morale, et si l’on s’habitue cela devient une addiction. Francine semble déçue par cette seconde lecture, comme si le livre de 2003 était un brouillon de celui de 2013 « L’invention de nos vies ». Il semble que certaines personnes se créent un rôle pour exister et se cacher derrière. Pourtant, on enseigne que « devenir soi » est un objectif essentiel selon Platon et Socrate au 5ème siècle avant JC, puis selon une grande partie des moralistes. S’adapter à l’environnement est un objectif important mais sans perdre son « âme », sans référence religieuse nécessairement. Voilà une question fondamentale. Une autre question se pose à nous dans le débat, la place de la créatrice : Francine nous dit que Karine Tuil lui semble distanciée, elle semble assez froide à l’égard de ses personnages, comme une journaliste, pourtant le thème de la famille et des frères antagonistes est traité dans deux livres majeurs de son œuvre…
Merci à Francine de nous confier ses réflexions personnelles.
Marie prend la parole pour nous parler de Delphine de Vigan que nous aimons beaucoup, c’est en 2015 qu’elle a reçu deux prix : le Renaudot et le Goncourt des lycéens qui l’ont révélée au public pour « D’après une histoire vraie », qui deviendra un film par R. Polanski avec Emmanuelle Seigner et Eva Green. Marie a lu un livre de 2007 « No et moi » qui lui a plu beaucoup (Prix des libraires en 2009, adapté au cinéma par Zabou Breitman en 2010). L’auteure a 40 ans quand elle l’écrit, après toute un parcours initiatique en psychologie et en analyse. Elle écrit et elle scénarise les romans pour les traduire en films. La presse parle de « Roman Moral » dans cette intrigue. En effet, elle nous parle de trois adolescents qui vont se rencontrer et s’entraider. Lou est une enfant surdouée de 13 ans environ, et est bien entourée dans une famille aisée, le père a une grosse situation, la maman ne se remet pas de la mort d’un bébé, une petite soeur morte subitement dans son sommeil. Depuis la dépression fait de cette jeune femme une personne sans énergie ni goût de vivre. No est devenue SDF, elle a 19 ans environ et elle a été rejetée par sa mère qui avait été violée très jeune. Elevée par ses grands-parents, elle n’a pas supporté le décès de sa grand-mère ; placée dans une famille d’accueil, elle est partie vivre dans la rue après avoir fugué. C’est une vie très dure, dans la saleté des rues, et la promiscuité. Lucas est un élève de la classe de Lou, il trouve cette jeune fille passionnante et son ouverture lui plait. Il vit dans l’appartement parisien de son père qui n’est jamais présent, sa mère s’occupe de lui matériellement mais il est assez seul en réalité. Ses études ne l’intéressent pas, et il se laisse aller.
Lou rencontre une jeune SDF pour comprendre comment elle vit et présenter ces données en un devoir scolaire. Elle aborde donc par hasard No, qui ne lui répond pas immédiatement, cependant pour son devoir Lou peu à peu apprivoise No en insistant pour parler avec elle. No sent que la présence de Lou lui plait, elle se met à exister, mais elle a peur que ce soit temporaire, elle part donc dans un autre quartier. Mais Lou la cherche, pour elle aussi c’est une rencontre amicale. Elle ne comprend pas pourquoi No fait l’indifférente quand elles se retrouvent. Cela fait réfléchir Lou ; elle se demande comment aider No ? Elle en parle à ses parents qui ne sont pas opposés à la recevoir, mais comment le faire accepter par No ? Cette dernière a besoin de se laver, d’accepter un changement de vie, de s’adapter à une famille. Ne sachant pas comment procéder, Lou en parle à Lucas. Celui-ci accepte de recevoir No et l’aide à reprendre une apparence plus sociale.
Chez Lou, les parents s’ouvrent à la présence de No, la maman sort de sa léthargie, le père lui trouve un travail de ménage dans un hôtel, ainsi No semble pouvoir commencer une nouvelle vie. Lou et No semblent deux sœurs en confiance. Mais un jour, une obligation familiale impose à Lou et à ses parents une absence de quelques jours, laissant No livrée à elle-même dans la maison. Elle ne répond plus au téléphone, elle semble absente. Revenant dans leur appartement, la famille ne trouve pas No, mais des traces montrant que No s’est laissée aller à la boisson, à la paresse, elle est partie !
Lou reprend la classe, elle ne sait pas que Lucas héberge No qui est alcoolique, ingérable et asociale.
Un soir, Lou est seule chez elle, ses parents sont au théâtre et elle va voir Lucas. La situation est découverte et Lucas étant seul dans son lieu de vie, il peut avoir de gros soucis. No repart dans la rue, elle se prostitue, et veut aller loin, vers l’Irlande. Lou est attachée à NO et veut partir avec elle, délaissant sa famille, l’école, sa sécurité. Elle suit No à la gare, mais ne possédant pas d’argent, elle prend conscience que No s’en va, la laissant dans sa vie protégée. Lou est désespérée de se retrouver seule. No révèle aussi son honnêteté profonde, laissant Lou très affectée par son départ.
Marie nous a conté cette rencontre avec une extrême délicatesse, elle montre la valeur des sentiments de chacun de ces jeunes aux prises avec la vie de notre époque. Ils cherchent tous l’empathie, une relation positive entre eux et « vraie ». Plus tard, Lou est amie avec Lucas qui a retrouvé sa mère et une vie plus logique pour un jeune étudiant.
Marie se demande si l’auteure veut montrer un déterminisme social à travers ces trois adolescences ; elle met en scène également trois formes d’abandon que nous pouvons côtoyer dans nos relations sociales, enfin c’est un roman moral : chacun respectant la vie de l’autre et son intégrité. Merci Marie pour ce grand moment d’échanges.
Nous ne nous verrons pas avant le 31 mai, pour deux zooms, l’un à 14h30 et l’autre à 20h30.
Ainsi pour le 31 mai, nous serons ensemble à 14h30 avec vos lectures de cette fin mai, je vous présenterai un livre des pays nordiques, assez original : « Le journal de ma disparition » de Camilla Grebe, une jeune femme diplômée d’un MBA des Affaires à l’université de Stockholm, livre couronné par le « Glass key Award », récompense du meilleur polar scandinave 2020.Il est édité en France chez Calmann-Lévy.
A 20h30, nous nous réunirons autour de Renée qui nous parlera peut-être des « Mémoires d’Adrien », le grand livre de Marguerite Yourcenar, et probablement Marie Do nous parlera du You tube de Boris Cyrulnik : « Le récit de soi ». Ce sera une grande soirée passionnante. Vous êtes tous les bienvenus lors de nos deux réunions du 31 Mai.