Aujourd’hui, beaucoup de nos amis sont en difficulté, Marielle ne pourra nous rejoindre que dans deux ou trois mois, elle est encore allongée. Marcel est inquiet, fatigué. Nous avons encore quelques vacanciers, Isabelle, Louis ; des amies très occupées, Marie, Nadine. Merci de nous avoir prévenus, nous pensons à vous. C’est donc Sylvie qui anime notre séance, avec un groupe très attentif : Evelyne, Monique, Aurore, Noëlle, Jean, Ida, Anne qui est venue vivre une séance avec nous, Annick, Nicole
Sylvie souhaitait que nous pensions aux femmes courageuses et créatrices : C’est un joli projet et Aurore a choisi un livre douloureux de Emilia Hart : « La maison aux sortilèges » publié en 2023 et traduit en 20 langues L’écrivaine est Australienne, diplômée d’université, elle a suivi l’école d’écriture de Curtis Brown. A 28 ans elle subit un AVC et doit se reposer, elle se lance dans l’écriture. Elle aime les femmes extraordinaires qui transmettent des héritages. Ce roman est construit sur trois vies espacées dans le temps mais liées par le désir de liberté. Ces expériences ont peut-être influencé ses choix, elle étudie le droit et devient avocate à Londres.
Le livre commence en 2019, lorsque Kate fuit Londres pour se réfugier dans une maison dont elle vient d’hériter pour échapper à un compagnon possessif. Eloignée de sa famille, de ses amies elle a vécu un triste quotidien. Dans cette maison, elle trouve la paix et ressent comme un mystère planer autour d’elle, particulièrement dans le jardin à l’abandon…
Puis elle décrit en 1942, Violet, une femme dans son milieu familial, un grand domaine où règne des contraintes, conventions anciennes, peut-être liées à la mort de sa mère. Seuls souvenirs de l’être disparu, un médaillon qu’elle conserve précieusement et une étrange inscription sur un mur. Son frère semble tout diriger, il est exécrable ; de temps en temps un cousin vient les voir. Elle est passionnée par les insectes et les sciences naturelles, mais a-t-elle le droit de s’y consacrer ?
Plus loin dans le temps en 1619, Altha est guérisseuse, réputée par sa connaissance des plantes ; c’est un savoir ancestral qui se transmet de mère en fille. Nombreux sont les villageois qui viennent demander de l’aide. Pourtant quand un fermier meurt piétiné par son troupeau, tous l’accusent de sorcellerie et même de l’avoir tué par sorcellerie. Le procès est douloureux.
Le livre est bien construit, il traverse le temps en scellant des secrets. Il est habilement mené et réussit à tisser une fine toile entre ces femmes qui vont parvenir à se relier. Il nous montre les conditions de la femme à travers trois époques différentes. Elles désirent toutes avoir la liberté de décider de leur vie. C’est un livre sombre et romanesque. Aurore nous lit des extraits de ce livre complexe.
Il s’inscrit bien dans l ‘axe du projet de Sylvie : « les femmes courageuses » Sylvie répond avec un poème de CH. Bobin, sur le thème « être vivante ». Ces écrits répondent les uns aux autres.
Evelyne suit le même thème avec un livre de Lucas Belvaux « Les Tourmentés ». Prix Régine Desforges du premier roman. L’écrivain est connu comme acteur. li est belge et a plusieurs César pour ses interprétations. Il est âgé de 61 ans. Le succès l’a accompagné depuis « Allons z’enfants » avec Claude Chabrol, jusqu’à « Des Hommes » adapté de Laurent Mauvignier. Une production cinématographique très importante et talentueuse. « Les Tourmentés » sont un premier roman.
Ce roman noir dégage une tension extrême au fil des pages. Trois personnages font un « marché » dont on ne connaît pas la teneur. Scander est un vétéran de l’armée qui est détruit par tout ce qu’il a vu et fait. Il se « clochardise ». Max est le frère d’armes, il a pu se guérir un peu et chez Madame, il a trouvé un objectif, aider celle-ci et en retour il est soutenu. Madame est une veuve très riche, instruite par son mari ; et ces trois personnes recherchent leur propre solution. Chaque chapitre est centré sur un personnage en particulier comme dans le livre présenté par Aurore, c’est un effet en profondeur. Madame est prête à tout pour se sentir exister. Au long des six mois qui passent, ils parviennent la résolution de leur contrat.
Evelyne a été passionnée par la tension qui se dégage au fil des pages. Elle a bien perçu que cela se construit comme un scénario de film ou une pièce de théâtre. Le style est dur et sans faille, Le légionnaire, pourrait être sorti de la saga Blackwater de M. McDowell. Le rôle de l’argent estimportant, mais faire du mal est un métier comme un autre, toutefois il laisse des traces intérieures longtemps. Après ce livre choc, Evelyne nous convie à un poème de Joël Mansa extrait du dernier opus, « Murmures : Bruissement ».
Chemin faisant nos amis s’interrogent sur la « bipolarité », un concept de maladie mentale qui se manifeste sous diverses formes. Ce sont d’abord des sautes d’humeur entre la dépression et l’exaltation, en cela elle est assez courante. Plus grave, elle peut devenir un état durable et conduire à de manifestations qui rappelleraient le roman « DR Jekyll and Mr. Hyde », la double personnalité. (L’auteur Robert Louis Stevenson 1886.)
Merci à nos amies qui vont revenir dans nos rêves, avec ces romans terribles !!!
Sylvie propose à Nicole d’intervenir pour adoucir l’atmosphère avec EE Schmitt et son 4ème livre « La lumière du bonheur ».
Quelques bases de Philosophie venues de la Grèce antique : E. E. Schmitt : « Dans la Traversée des temps » Tome IV « La lumière du Bonheur ». Vivre à Athènes entre Socrate et Platon. On se souvient que EE Schmitt a entrepris l’histoire des êtres humains depuis le Néolithique, Homo sapiens jusqu’à aujourd’hui en huit Tomes. Nous connaissons déjà le Déluge, Babel et la Mésopotamie, L’Egypte et les Pharaons, et maintenant, la Grèce Antique. De temps en temps, Schmitt convoque le présent en situant son récit avec les mêmes personnages : Noam, Noura, Derek, héritiers des temps, à Los Angeles dans la famille de Britta Thorensen, jeune Ecolo devenue une icône mondiale. Ce grand écart, souvent inattendu, coupe les récits des temps passés, et montre le côté mythique des personnages et des lieux du passé
Le tome III sur l’Egypte se terminait mal pour deux personnages éternellement amoureux : Noam et Noura. Nous les connaissons depuis les temps primitifs. Pour garder auprès d‘elle son amoureux, elle avait soudoyé des artisans spécialistes des tombeaux royaux, pour qu’ils ferment le tombeau du pharaon avant que Noam et elle-même n’en sortent. Mais les capacités de perception et de créativité de Noam font qu’ils parviennent à en sortir. L’un sans l’autre, ils s’adaptent à leur destinée. Noam se retrouve sous l’ère de Périclès vers 461 avant JC ; Ayant eu l’art de plaire à une jeune femme qui venait consulter la Pythie à Delphes, il se retrouve très vite dans un cadre social privilégié : Daphné est la fille de Socrate et de son épouse Xanthippe, une femme de pouvoir et de bon sens. Elle a pour fils Périclès qui ne s’en vente pas ! . Très subtilement Schmit nous introduit dans la société athénienne par les pratiques sociales des jeunes hommes bien nés. Noam, devenu Argos,( le géant aux cent yeux) a des qualités physiques remarquables, il est immédiatement requis au Gymnasium. Il y côtoie des managers compétents, des beautés comme Alcibiade, neveu de Périclès, beau comme un dieu ; des sportifs légendaires, et Socrate s’éprend de lui intellectuellement. Leurs conversations sont des témoignages de la philosophie de cette époque, IV ème siècle, une période reconnue comme le classicisme grec. L’objectif de ce groupe intellectuel est de participer aux Jeux Olympiques à travers la Grèce ; les Jeux d’Athènes, de Olympie, d’autres encore et Argos- Noam s’est entraîné, devient inégalable, et même il se sent soutenu dans certains exploits par une force divine. Mais cela risque de disparaître lorsque l’épouse de Périclès vient visiter les Héros du stade en accompagnant son époux. Noam est affolé, il ne souhaite pas la rencontrer et se cache derrière son masque de médecin. Il a compris que Noura est en fait l’épouse de Périclès. Tout va-t-il voler en éclats ? nous sommes au centre du récit.
C’est une lecture sympathique, aisée, même facile. Toutefois Schmitt est fidèle à son projet culturel, il distille, au cours des pages et des rencontres de Socrate et d’Argos les grands principes de la Démocratie athénienne, de la pensée platonicienne, de l’histoire des idées et des hommes remarquables de ce siècle dit classique, créateur de la plupart de nos valeurs humanistes que nous retrouvons du 17ème S dans le théâtre au 18emeS chez les philosophes, « Les lumières » . Vous y trouverez, les dialogues énonçant les principes de tolérance, d’humanité, de rigueur sur le statut de Citoyen, par opposition au Métèque qui est respecté, de liberté par rapport aux religions ou cultes, de courage devant les combats du gymnase ou de la guerre ; toutefois, on y trouve aussi l’humour ou l’astuce que développe Ulysse, le Héros de l’Iliade et l’Odyssée, la douleur de la reine grecque Clytemnestre. Beaucoup de difficultés ou de conflits sont traités par la négociation et la « ruse pour sauvegarder la vie humaine ». La ruse n’est pas négative si son objectif est humaniste. Chercher le Bon, le Vrai, le Bien conduit au Beau : l’essentiel des valeurs démocratiques que nous avons à protéger. Cela nous renvoie à Platon, « La République, l’Apologie de Socrate ». Si par hasard, vous aviez oublié vos lectures du Bac de Philo, voilà une très aimable façon de les rappeler. J’aime cette façon de changer de vie ou d’univers grâce à ce type de lectures. La guerre si proche de nous a été une réalité à Athènes, cela rappelle que les Civilisations sont mortelles, leurs réalisations ont pourtant coûté tant d’efforts !
Je ne vous ai parlé que de la moitié de ce traité de l’histoire humaine. A vous de compléter cette recherche du savoir-vivre humaniste dont on retrouve les principes dans toute notre littérature et philosophie classiques, celle de nos philosophes des Lumières. Confrontation possible : un autre livre à succès « Le monde de Sophie » de Jostein Gaarder. Il propose les bases de la philosophie pour des jeunes, étudiants ou non.
Merci à Sylvie d’acquiescer à ce plaidoyer dont nous partageons tous les principes.
Elle souhaite à son tour, présenter une femme, une œuvre, un livre qui pourraient intéresser non seulement les enfants auxquels il est destiné, mais tous les adultes épris de contes, de dessins et de beauté.
ELZA Lacotte d’une part, présente un conte du « pourquoi » ou étiologique, qui explique l’origine du ver à soie. D’autre part, Virginie Symaniec, née à Maisons-Lafitte en 1968 ; elle a décidé de tout quitter pour créer sa maison d’édition indépendante : Le ver à soie. Son catalogue est construit autour des thèmes du voyage, de la quête et des multiples expériences de l’exil (choisi ou subi). Pourquoi le ver à soie ? Dans son article consacré « au ver à soie en Perse », Edouard Charton 1854, rapportait que les Guileks faisaient remonter aux temps bibliques l’apparition sur leur terre du ver à soie : selon eux, un miracle par lequel le dieu avait décidé de récompenser les hommes qui savaient souffrir, en leur donnant cet animal qui allait répandre de nombreux bienfaits sur la terre de Guilan.
Sylvie a rencontré cette créatrice, née en 1986 qui vit à Clermont Ferrand. Elle est plasticienne des Beaux -Arts de RENNES et de l’Ecole européenne de Poitiers avec Félicitations. Elle exerce en tant que graphiste et sérigraphe ; elle oriente sa pratique sur l’imaginaire, le voyage et la quête. Le livre est paru en 2014, elle y imbrique le dessin imaginaire au texte. Son éditrice Virginie Symaniec est sa partenaire pour ces réalisations. ( site : virginie.symaniec@leverasoie.com), recettes de cuisine…et…
Le livre : « La déesse du ver à soie », est une adaptation d’un conte chinois sur l’exil et la résilience. On y apprend comment une femme réussit à transformer sa tristesse en apportant la richesse aux petites gens par la création du plus beau fil qui soit. Mais dans ce discours, on va retrouver des symboles universels : le duo père-fille, l’absence de mère, la violence envers un être qui pourrait voler cet amour.
Mais voilà une promesse est une promesse et la jeune fille et la créature sont liées.
Deux êtres dont l’amour est condamné par les hommes s’unissent malgré tout. Mais leur union a aussi comme prix, l’exil et la solitude. Il n’est pourtant pas question de vengeance ou de désespoir mais plutôt de résilience et d’espoir en la vie plus forte que tout.
Au fil des pages, ponctuant les dessins en noir et blanc, on retrouve un petit sceau rouge qui prend différentes formes, sorte de fil rouge au sens propre à la fin. Sans nul doute un fil de la « Déesse des vers à soie » !
L’une des caractéristiques de cet animal est de se muer en une chrysalide après avoir su tisser un fil sans brisure. Dérouler les fils- y compris ceux de la pensée- les attacher au métier, les tresser, les entrelacer, tisser des liens, explorer les trames de nos imaginaires et les raisons de nos solitudes, c’est bien là ce que font concrètement tous les éditeurs. > Cette éditrice poursuit : < L’idée du ver à soie est née en 2005, et ce n’est peut-être rien d’autre que le rêve d’un petit jardin à cultiver avec tous les outils qui m’ont été imposés pendant tant d’années par le chômage et la précarité dans l’espoir qu’il en existe d’autres moins difficiles à manier. Ou bien est-ce encore une énième bouteille de créativité jetée dans les flots toujours tourmentés ? Je me dis que je ne suis pas seule et qu’il y a d’autres tisseurs qui méritent d’être rencontrés. La porte reste ouverte à tous ceux et celles qui sont à la recherche d’un mûrier blanc.> cf photo de la page de garde.
C’est Sylvie qui nous offre le thé, avec une plantation de son jardin, origan ? je ne sais plus. Petits gâteaux, C’est délicieux. Merci à notre animatrice.
La prochaine réunion du Café littéraire aura lieu le 7 octobre 2024, à 14heures.