Café littéraire du 09/09/2024 📜📚

 Notre « Triumvirat Sylvie, Louis et Marcel » a fait merveille aujourd’hui pour ce premier Café Littéraire de l’année 2024-25. Nous les remercions tous chaleureusement. La salle était prête soigneusement rangée, un document présentant leurs visages et leurs coordonnées sympathiquement présenté pour chaque participant, l’accueil chaleureux à chaque arrivée était magnifique à voir. Nous étions heureux de nous retrouver : « Comment va Marielle ? Marie-Josée ne nous rejoint pas ? » Il nous manquait aussi Annick et Noëlle. En revanche Marie, Marcel, Sylvie, Louis, Nicole Camugli, Monique, Evelyne, Aurore, Nicole S., Jean, Isabelle, Jacqueline, Nadine sont venus fêter cette reprise ; Accompagnés de l’amie de Sylvie et d’un couple Mr et Mme Haberard. Ida est en mission pour le jumelage Bouscat-Amstadt pour quelques jours, nous lui souhaitons bon succès.

Louis a présenté rapidement l’histoire du Café littéraire et ses principes ou valeurs : échanges, liberté de pensée et respect des idées, ouverture à tous ceux qui souhaitent participer, éviter la solitude, s’intéresser aux livres et aux débats d’idées. Merci pour la présentation et l’organisation.

Quelques annonces sont proposées :

* L’AG de Passerelles aura lieu le samedi 28 septembre à 11h 30 à l’Ermitage, salle Rotonde au rez de chaussée. Un apéritif suivra !

 *Le cinéma de Bruges, Centre Treulon propose gratuitement des films à 15h30 et débute le 29 septembre avec un biopic sur DJango Reinhart.

* le « Ciné-Passerelles » animé par Isabelle reprend ses propositions de sorties cinéma sur WhatsApp. 

C’est Evelyne qui va prendre la parole pour présenter un livre qui l’a étonnée, de Kamel Daoud « Meursault, contre-enquête ». L’écrivain est né en 1970 à Mesra, près de Mostaganem…  Prix Goncourt du Premier roman 2015. Une forme de proximité avec A. Camus, né à Dréan en Algérie, devenu journaliste et écrivain, comme un modèle social et intellectuel.

« Ce n’est ni une critique du livre de Albert Camus, ni un plagiat » nous dit-elle. Le livre date de 2004, c’est plutôt un clin d’œil du jeune journaliste au Quotidien de la ville d’Oran. Il est né dans une famille de six enfants et a fait des études, Bac C puis Etudes de lettres pour écrire en Français, il pense en effet que la langue arabe est piégée par le sacré. Il reprend l’intrigue de l’Etranger de Camus dans son livre : il en fait une lecture alternative avec les mêmes faits :  drame sur la plage, personnage du héros, la mère dominatrice… Mais les détails du roman montrant le monde absurde sont finement réécrits par opposition ou recadrage. L’Arabe qui n’est pas nommé par Camus devient Moussa, il est accompagné par un frère Aron ( ?), et la victime devient un Français. Tout le roman prend un autre sens, et pourtant il y a peu d’ajouts extérieurs. Il fait ainsi passer des thèmes différents concernant les oppositions politiques et humaines entre la France et l’Algérie, ceux des années 1960 et plus encore : identité contre l’idée d’assimilation de deux peuples (Algérie Française), colère, désarroi jusqu’à l’allusion aux drames survenus en France en 1962 lors d’une manifestation meurtrière.

Islamiste pendant l’adolescence, il quitte cette mouvance à 18 ans et participe à une pensée d’opposition au gouvernement à Mostaganem en 1988. C’est un journaliste reconnu et un écrivain prometteur, son dernier livre « Houris » 2024 paraît en ce moment. Quelle peut-être son interprétation ?

Un échange nourri s’installe entre Louis, Sylvie et Evelyne. L’expression « Livre Miroir » me paraît très intéressante. Merci à Evelyne dont les choix sont toujours originaux.

Nicole C. parle à son tour : Elle rappelle que sa présence est rare, elle vit beaucoup à La Réunion, et elle adore lire et venir nous présenter un livre passionnant : Elle aime Amin Maalouf et pour une fois son auto- biographie l’a étonnée et enrichie, alors qu’elle n’aime pas trop les biographies. « Origines » est son dernier livre, il y fait un retour sur son immense famille, tout en nous décrivant l’histoire de l’Empire Ottoman. Dans une malle oubliée, il a découvert des photos, des textes anciens. Un livre de culture, comme tout ce que publie ce Conteur du Moyen Orient.

Puis, elle nous emmène plus loin en Chine-Taïwan, Un écrivain Chiang Sheng Kuo et son livre : « Taipei Pianissimo » traduit en Anglais, « The Piano Tuner » paru en 2020 ; « un livre poétique sur la musique, l’amour, la délicatesse, l’harmonie, nous dit Nicole C. » , une valse lente, à trois temps entre un veuf brisé par le décès de son épouse qui était une artiste et conduisait une école de musique. Que faire de cette école ? que faire des instruments de musiques, et particulièrement d’un piano désaccordé, un Steinway. Cette période de sa vie le conduit vers des souvenirs, des retours dans une ruelle de Taipei à New York sous la neige par exemple. Nicole nous parle d’un accordeur qui est ému par l’amour de ce vieil homme, il va écrire le livre de ce chemin de souvenirs et d’humilité devant le difficile travail de l’accordeur qui recrée, au mieux, les valeurs, les sonorités exceptionnelles de l’instrument et fait face aux imperfections de la perception humaine… Le livre a décroché les plus grands prix littéraires à Taipei.

 

Merci Nicole, notre voyageuse fidèle. Des échanges nombreux rappellent un livre de Murielle Barberie dans « Une rose seule », livre d’atmosphère avec la visite passionnante des temples. On demande comment as-tu choisi ce livre ? en fait Nicole a lu la 4ème de couverture qui est bien faite.

Nous avançons dans notre après-midi, Sylvie demande quand faut-il mettre une « pause poétique » ? et finalement nos lecteurs et participants se disent capables d’écouter la présentation suivante. Celle de Nicole S.

C’est un livre dur et sans concession que Nicole va partager avec le groupe : de Karine Giebel, « Et chaque fois mourir un peu », édition Récamier noir paru en 2024. J’ai voulu découvrir le livre sans lire la 4ème de couverture pour tester mes ressentis. L’écriture est claire, vraie, journalistique, avec des chapitres courts et une mélopée poétique, sensible, pleine d’amour, inattendue. Elle reparait souvent, toujours dans la même tonalité. Intriguée je cherche la formation de l’écrivaine. Ce roman, mais est-ce un roman ? ce n’est pas une fiction apparemment, est son douzième opus. Karine a fait des études de droit, une licence, de nombreux petits boulots pour payer ses études, elle occupe longtemps un poste de juriste dans la fonction publique, puis elle se lance dans l’écriture de polars et s’installe dans le Var. Elle a vécu ou traité des faits lourds, durs, son style s’en ressent, mixant le réalisme, l’audace, la violence. Et puis tout au fond une immense délicatesse. Elle est née en 1971.

Son livre décrit les douleurs d’un héros, 1m90, sportif, montagnard, aux prises avec les conflits multiples de la planète, au sein d’une ONG importante qui l’envoie depuis une quinzaine d’années sur les terrains divers, selon les années. Trois mois sur le Kosovo ou l’Afghanistan, ou le Congo, le Rwanda la Tchétchénie…puis des moments de repos pour se remettre et repartir. Les équipes sont bien organisées, efficaces et sympathiques. Il ressent peu à peu une sorte de dépendance à ces moments d’exaltation, de satisfaction intime, « sauver des êtres faibles, victimes possibles ». Il est comme drogué à ces actions dans lesquelles il se dépasse et meurt aussi chaque fois devant les souffrances.

Il manque plusieurs fois d’y mourir par agressions, par imprudences ; ces missions ont débuté alors qu’il était un homme heureux en famille dans sa montagne : une épouse aimée, une fille de 8 ans, puis le deuil après leur accident de voiture qu’il imagine et revit constamment dans ses rêves. La reconstruction est possible mais les situations sont de plus en plus dangereuses. Je vous laisse découvrir ce livre à la couverture attirante, à la lecture obsédante. L’écriture est remarquable dans un roman d’actions complexes, selon les analyses qu’en fait Grégory, sur son rôle, sur son état, sur son environnement. Une grande découverte : un livre et une femme écrivain.

Les critiques du livre sont toutes de très grande qualité et élogieuses. Le lecteur est vraiment confronté, comme Grégory, à l’insoutenable, mais il faut s’en remettre… Il y a de l’humour et de la positivité. Bonne lecture.

Bien sûr les réactions du groupe sont nombreuses, nous savons que depuis le conflit en Ukraine, nous sommes protégés en France. Certes nous sommes confrontés aux douleurs, dans notre vie, mais pas avec la répétition de ces catastrophes comme peut les vivre Grégory, dans une ONG, sur des terrains dangereux. Marcel est passionné par ces audaces littéraires. Mais notre public de lecteurs est âgé, il affronte lui aussi des dangers et la confrontation à la mort. Etre présent pour parler de ces dangers, au sein d’une association comme la nôtre, c’est déjà une sorte de lutte contre l’oubli, le laisser-faire ; c’est pour nous tous la volonté de connaître par des récits, ces luttes et ces victoires.

Sont bienvenus Sylvie et son moment poétique. Elle aime énormément Christian Bobin, et parmi les recueils de sa vie et de ses pertes, elle choisit « La plus que vive » son amour disparu. C’est un hymne à la femme et à ces combattantes qui aiment les êtres et sont capables d’indulgence ou de pardon. Sylvie souhaite nous parler pendant plusieurs séances de ces femmes fortes.

La première est Claudie Hunzinger : elle est née en 1940 à Turckheim, sur le versant alsacien des Vosges. En 1972, elle revient dans cette région pour s’y retirer et vivre en harmonie avec la forêt, la nature. Elle est plasticienne de profession, et elle parle de la perte de ses forces, à cette époque et de son besoin de vivre au rythme de la nature.  Le livre qui a plu à Sylvie : « Le chien à ma table » Prix Fémina en 2022. Le chien s’appelle « Yes », symbole de l’ouverture à la vie pour l’héroïne Sophie, à la liberté, à l’amour de son compagnon Grieg plutôt centré sur les livres plus que sur la nature, les arbres, ou les animaux que l’on connaît mal. Elle réalise des tableaux qui semblent irréels par l’atmosphère et la présence des longues herbes folles ; leur lieu de vie est perdu dans la forêt : « Le bois banni », un lieu oublié de tous et cela leur convient très bien. Les mots d’ordre de Claudie : « Ne rien céder au désespoir, trouver dans tous les moments de vie un sourire, une petite joie, par les mots, par les livres. Elle découvre qu’elle est seule et pourtant heureuse ; peu à peu elle se découvre créatrice de beauté, de vie et d’amour. Serait-elle un peu chamane ?

Elle perçoit les sources de survie de la nature, et Jean d’approuver ces découvertes. Il insiste sur les adaptations possibles de la nature. Certains évoquent l’environnement de Tchernobyl qui renaît avec les forêts et les animaux, chevaux, cerfs, et autres.

Merci à Sylvie qui nous donne tant de richesses à développer en chacun de nous.

 Marcel a lu des livres passionnants et une femme passionnante : Olga Tokarczuk, elle est écrivaine, polonaise et Ukrainienne, Prix Nobel de littérature en 2019. Il présentera plus tard un de ses livres, une somme de 1205 pages : « Le livre de Jakob » composé après 10 ans de recherches en 2014 et reçoit le Prix Nike en 2015 : « On lui reconnaît une imagination narrative qui avec une passion encyclopédique, représente le franchissement des frontières ».

 

Marcel nous présente d’abord un livre plus modeste : « Les ossements des morts ». Cela commence comme un roman policier, puis l’enquête nous emporte très loin.

 Un homme est mort dans la cuisine de l’héroïne du roman ? dans sa gorge, un osselet. Que s’est-il produit durant la nuit ?   Janina Douchenko est enseignante vit seule au cœur des montagnes Suddètes, dans une région peu peuplée, mais passionnée de chasse, cette découverte l’inquiète. Cette femme a une formation d’ingénieur et donc de réalisme, mais elle est confrontée à des croyances qui lui sont étrangères et cela produit un livre assez étonnant, inclassable peut-être mêlant savamment ésotérisme, mysticisme, écologie, et magie. L’écrivaine interroge avec une grande poésie notre rapport à l’univers, au monde animal, nous dit Marcel. Un livre assez différent de ce que nous lisons, poétique et peut-être surréaliste. Marcel nous parle d’une écriture sèche et réaliste…les intrigues sont bien menées, chaque détail compte. Le tout enveloppé dans un humour plutôt noir.

Marcel nous reparlera du « Livre de Jakob » qui est fort complexe…

Nous avons bien besoin de réconfort après ces présentations passionnantes, mais un peu sacrifiées au Dieu Horloge pour la fin. Que Marcel nous excuse de l’avoir pressé.

Nous nous retrouvons le lundi 23 septembre, à 14heures , pour de nouvelles aventures littéraires.