Zooms littéraires du 03/05/2021 (14h30 et 20h30)

 Bonjour chers amis.

Ce lundi à 14h30, nous nous sommes retrouvés à 9 adhérents, et le soir à 20h30, nous étions 3 fidèles : belle journée puisqu’elle a réuni 11 adhérents (12 personnes si je me dédouble… !) Merci à Michèle, Marie, et ses deux amies Nadine, Christiane, Francine, Marie-Françoise, Bernard, et Jean-Jacques qui nous a présenté la première lecture… Louis avait eu la gentillesse de nous prévenir de son absence.

Cliquez ici pour accéder au compte-rendu du zoom de 20h30

Zoom littéraire de 14h30

Jean-Jacques, grand merci de nous parler de « L’énigme de la chambre 622 » de Joël Dickers, dont nous connaissons : « le livre des Baltimore » et « la vérité sur l’affaire Harry Québert ». Prix Goncourt 2012, et de l’Académie Française. Jean jacques aime ce type de livre bien écrit, clair et animé par une intrigue qui ne faiblit pas. La chambre 622 d’un hôtel est le cadre d’un meurtre, cela répond à Gaston Leroux dont nous connaissons « le mystère de la Chambre jaune »…. Que s’est-il passé ? le héros enquête avec les locataires des chambres voisines, 621 bis et 623. C’est un roman de détente, léger qui se passe en Suisse dans la belle station de Verbier et à Genève. Voilà de quoi passer un bon WE de pluie….

Marie est fidèle à Delphine de Vigan, avec un nouveau roman « Les heures souterraines. 2009». C’est à la fois un roman social et psychologique : la descente aux Enfers d’une jeune femme employée, Mathilde, qui prend conscience que jour après jour elle se démotive en allant à son poste habituel. De même un autre personnage Thibaut, employé aux urgences médicales vit cette perte du sens de son rôle social. Pour Mathilde c’est une remarque dans une réunion, qui parut une agression au responsable de cette entreprise. Depuis elle vit une sorte de harcèlement moral, elle est exclue de la vie de son service et empêchée de profiter d’une mutation qui lui permettait de faire vivre sa famille.

Le groupe est intéressé et je fais allusion au roman de Valérie Nothomb « Stupeurs et Tremblements » que connaissent Bernard et Francine. Nous évoquons à ces propos, le rôle de l’amertume et de la résilience dont nous avons parlé dans les réunions précédentes ; (Cynthia Fleury : « Ci-Git l’Amer » et Boris Cyrulnik.) Marie fait allusion au texte de « la grande vague » document japonais ancien repris dans un texte sur la reconstruction, le jour d’après la pandémie (  dans The Conversation). Merci à Marie de rappeler nos projets à complèter.

Bernard que nous sommes heureux de retrouver, cite le roman de Michèle Fitoussi : « Helena Rubinstein.  2010 » La femme qui inventa la beauté. Une incroyable aventure : née à Cracovie, en 1872, d’origine juive, elle est l’ainée de huit filles et s’installe avec sa famille dans divers pays pour survivre, d’abord l’Australie puis New-York où elle mourut à 93 ans. Une carrière difficile, mais des rencontres brillantes dans les débuts du XXème siècle, avec en toile de fond, la cosmétologie. Pour Michèle Fitoussi, Héléna est l’illustration en actes d’un siècle de conquêtes pour les femmes.

Bernard aime aussi le livre de Agnès Martin Lugand : « J’ai toujours cette musique dans la tête », l’histoire d’une famille, manipulée par un ami, qui installe une emprise sur le couple. Le livre n’est pas trop méchant mais dans certains cas le danger est très grand. Mazarine Pingeot : « La peur continue. » Cet état émotionnel n’est pas rare, et ce roman essaie de débusquer les scènes qui ont produit cet état dans la personne de Lucie.

 Voilà des propositions de lecture qui vont faire plaisir à tous et toutes.

Nicole a relu un roman culte un peu ancien dont elle aime l’écrivaine : Marguerite Yourcenar : « L’œuvre au noir». C’est un livre de 500 pages, édité dans les années 1925 mais souvent repris par l’auteure (1954- 1975), enrichi de notes intéressantes sur l’origine du roman, sur les témoignages d’écrivains de l’époque 16ème siècle. « Plus je vais, plus cette folie qui consiste à refaire des livres anciens me paraît une grande sagesse, dit-elle, en repensant aux personnages auxquels elle a donné vie ». On pourrait aborder cette œuvre à travers plusieurs contextes très riches et une intrigue autour d’un héros :

La vie du Héros, Zénon, né vers 1516, peut-être de Albérico De Numi, cousin du Pape Jules II, nouveau-né reconnu par Sébastien Adriansen qui épousa sa mère Hilzonde. Mère qui est décapitée après un épisode de vie sordide. La quête de pureté et d’excellence, c’est Zénon qui va la poursuivre dans une vie d’ascétisme, choix difficile qui délaisse le luxe et le faste. En 1536, il a 20 ans.

Un premier contexte porte sur les débats entre religions : la papauté catholique et les indulgences, les travaux des réformateurs, Erasme, Lefèvre d’Etaples, la réforme Luthérienne qui se dilue dans la guerre des Paysans et ses excès, puis la réforme Calviniste. Leurs conséquences touchent la vie de la population européenne, puisque toutes les régions sont touchées par ces actions de destruction et de recomposition. En 1549 la peste vient de l’Orient par la Bohème, elle entre en Allemagne.

Enfin le deuxième contexte enrichit le récit et s’imbrique dans l’intrigue :  c’est l’initiation à l’Alchimie qui pourrait constituer le GRAAL dans cette période de guerres et d’incertitudes, la Quête d’un esprit libre comme l’est Zénon. Occupé par sa volonté de comprendre la nature, de ne pas céder aux fausses divinités, il marche dans l’Europe entière, apprenant les bases de la médecine à Montpellier, la politique en Italie, en Pologne, il est herboriste et accroît constamment sa compétence sur les herbes médicinales ; il pratique des autopsies pour connaître le corps humain, comme Léonard de Vinci ; il écrit des traités  comme Erasme :  sur « Le monde physique » confié à Etienne Dolet, « les Prognostications » ensuite et le « Prothéories ». Il rejoint les armées comme médecin, puis devient Sébastien Théus pour revenir en France, en Italie, puis en Belgique, à l’époque sous la domination de Charles Quint

 C’est alors que Marguerite Yourcenar donne à son personnage le temps de la réflexion : Zénon  a près de 50 ans il revoit ses voyages, sa vie, ses expériences, il pratique la médecine et comprend qu’il est au sommet de son art. Partie difficile pour le lecteur que ces méditations qui conduisent Zénon à comprendre qu’il possède une somme de savoirs à mettre à la disposition des plus démunis, à l’hospice. Au bout de 50 années d’expériences, il fait le point : « Médecin, alchimiste, artificier, astrologue, il avait porté bon gré, mal gré, la livrée de son temps. » Dans cette époque dangereuse, il fallait vivre vite, comprendre le plus de choses, recueillir le maximum d’informations. Il comprend comme dans une illumination, que les trois étapes de l’Alchimie sont sa route, il a vécu l’œuvre au Blanc durant ses 50 premières années, puis restent deux étapes, l’œuvre au rouge et l’œuvre au noir : « Opus nigrum » de Nicole Flamel, dont nous gardons la mémoire dans la tour Saint Jacques près du Châtelet… « C’est ma part, dit-il, la plus difficile qu’il me reste à vivre et à faire. » Pour appuyer cette prise de conscience, il fait l’expérience de ce que nous appelons, « la réflexivité » la possibilité de se voir, voyant comment son œil voit…Cela lui paraît une illumination qui va changer le cours de sa vie.

Il est à Bruges, quelques anciennes relations se pressent autour de lui, peut-être pas les meilleures… mais il est confiant, il connait les dangers de l’époque, on peut l’atteindre par ses livres, mais pas par ses actes, pensent-il. Une affaire d’infanticide, puis de mœurs dissolues dans les caves du couvent rejaillissent sur lui et il est arrêté pour complicité d’abord, puis pour toute sorte de faits qui deviennent coupables pour les autorités religieuses. Toutes ses anciennes connaissances viennent déposer, sauf les personnalités qui auraient eu suffisamment de poids pour le soutenir comme sa sœur Martha. Mais son isolement, les soupçons que cela laisse peser, son ascétisme sont perçus négativement il est condamné au Bûcher. Son ancien maître lui suggère même comme solution de renier ses idées… Est- ce possible ? Comment éviter le Bûcher, sinon en se sacrifiant soi-même. Et il devient pendant sa dernière nuit l’observateur de sa propre mort, et complète sa connaissance de la vie humaine. « L’âme et le sang s’échappaient ensemble de mon corps…j’apprends encore de ma mort. »

C’est un peu long, mais on ne peut pas raccourcir une expérience humaine aussi étonnante….

Merci à mes amies du soir de trouver ici le travail qu’elles ont préparé et raconté, à peine complété par ce que je savais de l’Alchimie. Souvenez-vous que Catherine de Médicis avait à la même époque son Alchimiste auprès d’elle.  Nicolas Flamel, Paracelse, sont de grandes figures du 16ème siècle.

Pour la semaine prochaine, le 10 mai, vos récits de lecture seront les bienvenus. Certains aimeront peut-être suivre le cours de Boris Cyrulnik : « la biologie de l’Attachement » sur You tube, il date de 2012 et complète le rôle de la résilience chez l’enfant. Il dure environ une heure et demie, c’est une mine de réflexions. Dans la suite du CR d’aujourd’hui, vous trouverez une première partie résumée de ce cours de Boris Cyrulnik,   dans la deuxième partie, vous découvrirez  les travaux du psychiatre auprès des jeunes en difficulté.

Zoom littéraire de 20h30

Renée nous a présenté « L’œuvre au noir » de Marguerite Yourcenar : l’intrigue et les contextes dans lesquels se déroule la vie de Zénon.  Et Nicole s’est permis de compléter à grands traits les étapes de l’aventure d’un alchimiste à travers la libre-pensée, la passion de la connaissance et la quête d’une unité rassemblant les grands champs du savoir de la Renaissance. Les Arts de la mécanique, de la médecine, l’astrologie et l’astronomie, la guerre et les feux artificiers. Cf le CR de 14h30.

Merci à Renée de faire des choix de lecture fondamentaux pour leur richesse culturelle et historique.

Marie Do a travaillé sur le You-tube de Boris Cyrulnik « La biologie de l’attachement ».

C’est un cours universitaire qui reprend les travaux essentiels sur la biologie des relations et de l’apprentissage : l’attachement étant un paramètre nécessaire à l’acte d’apprendre. Les instituteurs le savent bien et les enseignants ne le négligent pas, bien sûr. Je reprends beaucoup d’informations données par Marie-DO, beaucoup de mercis à Marie-Do.

Boris Cyrulnik travaille avec des équipes de chercheurs et se déplace si nécessaire, jusqu’en Roumanie, par exemple. Des orphelins de guerre , restés sans soutien et sans relation avec des adultes végétaient dans un dortoir et passaient leur temps à se balancer sur place et à faire avancer leur lit sur lequel ils étaient attachés. Ils étaient devenus autistes. Soutenus par des psychologues pratiquant la résilience, une ambiance plus attentive et des relations humaines plus maternantes, leur état s’est amélioré nettement.

Un principe de Cyrulnik que connaissaient bien les nourrices autrefois, « le bébé s’attache à la mère parce qu’elle le nourrit. » le mot « mère » est dans beaucoup de langue un arrangement de « miam ».

Ce principe démontré par le psychiatre utilise des animaux pour démontrer les théories, elles sont expérimentées, analysées, puis contrôlées de façon que l’on puisse progresser dans les raisonnements sans mettre l’enfant en position « d’objet d’analyse », ce qui pourrait être dangereux pour lui. Chaque phase permettant la progression d’une théorie est soumise à ce principe expérimental. C’est une attitude « épistémologique », respectueuse des acteurs observés, respectueuse de la démarche scientifique. Puisque l’on ne peut pas observer la globalité d’une situation ou d’une personnalité sans faire d’erreur, on est obligé de fragmenter les savoirs concernant la personne. Cela intègre des données affectives, psychologiques, sociologiques, et humanistes. Cela met en place des causalités plurielles ou multipolaires.

Pour synthétiser, le cours de Boris Cyrulnik est d’abord une méthodologie appliquée au fait psychologique pour le rendre scientifique et lui garder un contexte humaniste et respectueux.

Il est naturel aussi de garder l’histoire des acquis en Psychologie du Comportement pour accéder aux états internes qui interagissent dans l’individu.

Cyrulnik évoque le travail de Sigmund Freud, le neurologue qui montre l’intégration des divers faits qui influencent la pensée et le comportement de son malade. Ce sont des faisceaux qui sculptent les cellules du cerveau.

Skinner qui travaille avec des rats pour démontrer l’influence du stress sur le comportement de l’individu : « Mon oncle d’Amérique, » film de Alain Resnais, en était une démonstration intéressante. Il sera aussi l’inventeur de l’enseignement programmé… 

Konrad Lorenz qui démontre le mécanisme de l’Empreinte sur les jeunes oies ; Harry Harlow qui isole de jeunes macaques pour démontrer leur état dépressif à la suite de cette expérience, puis leur retour à des comportements plus habituels après une sorte de résilience… Ces expériences ont influencé la psychologie pédiatrique. Le modèle animal est pertinent et de plus en plus on ne fait plus de différence entre les divers bébés humains et animaux, excepté à partir de l’accès à la parole pour les bébés humains. En effet la compétence langagière développe le « lobe-préfrontal », c’est le cerveau-idée qui apporte un grand écart entre l’homme et l’animal.

Le modèle animal est plus déterminé, l’homme, lui, construit ses moyens de pensée…Toutefois, il faut des familles maternantes pour que l’enfant se développe et le père comme la mère sont capables de le faire.

Cette leçon consacrée à l’Epistémologie et à l’évolution des travaux en Psychologie pour montrer la qualité scientifique de ces expériences, constitue la première partie du cours donné par Boris Cyrulnik, je vous conseille de le suivre pour compléter les données recueillies par le psychiatre à travers ses observations sur les enfants et les adolescents.

You Tube, cours devant les étudiants d’une fac Lyonnaise, 2012, durée 1h30 environ. Il reprend sa conférence au Collège de France.

Pour le prochain Zoom du Soir, le 17 mai 2021, Renée va choisir son prochain livre à nous présenter en partie ou en tout. Et je suggère à Marie-Do de voir le You tube sur « Parler de soi » de Boris Cyrulnik.

 Puis nous changerons de philosophe, peut-être Freud, le You tube « Une vie, une œuvre » ou « Le ça, le moi, le surmoi. » pour une première approche, si cela te convient.