Zooms littéraires du 19/04/2021 (14h30 et 20h30)

Chers amis lectrices et lecteurs, nous avons beaucoup travaillé en cette journée qui fut consacrée particulièrement à Boris Cyrulnik, encore…et peut-être pour de bonnes raisons que vous comprendrez, je pense. Merci à vous tous de nous suivre dans nos réflexions, dans le partage de nos lectures.

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Zoom littéraire de 14h30

Jean-Jacques est venu ouvrir notre séance de 14h30, et nous l’en remercions vivement.

Nos fidèles lectrices Marie et Francine étaient présentes, et Louis avait préparé une intervention importante sur une partie du livre de Boris Cyrulnik.

Louis a fait un résumé de sa recherche que je vous retransmets : « La nuit, j’écrirai des soleils »

« Louis propose ici d’approfondir par trois exemples la manière dont s’est exprimée la résilience, c’est-à-dire la reconstruction psychique suite à des traumatismes de divers ordres, et d’en faire une analyse comparative qui révèle quelques aspects intéressants.  Ils sont tirés du livre de Cyrulnik et concernent : Jean Genet, Gérard Depardieu et Romain Gary.  

Pour Cyrulnik, la résilience est un chemin : un chemin vers la reconstruction psychique… Ce chemin indique un mouvement qui est bien traduit par le titre du livre : il va de la nuit, c’est bien sûr la nuit du traumatisme, au soleil de la reconstruction, de la créativité et de l’œuvre accomplie. Le mode de reconstruction traité par Cyrulnik est principalement celui de l’écriture.

1 – Le cas Jean GENET. Né en 1910 à Paris. Père inconnu. Abandonné par sa mère à 7 mois. Placé dans une famille adoptive (Régnier) dans le Morvan : choyé par sa nouvelle mère, environnement affectif, protégé, sécurisé, va à l’école, mais caractère réservé et taciturne. Il est homosexuel, premiers émois masculins assez tôt, premier vol à 10 ans, il affirme assez vite son comportement asocial. Passage dans une colonie pénitentiaire, avec toute sa liturgie de domination/soumission masculine. Légion étrangère en Afrique du Nord. Retour à Paris, petits larcins, 4 ans dans les prisons de La Santé et de Fresnes.  La toxicomanie s’ajoute à ce décor peu flamboyant. 

Le déclic s’opère en prison : se consacrer à l’écriture. Premier roman remarqué : « Notre dame des fleurs » : évocation de personnages ambigus de la nuit homosexuelle parisienne.

Il semble trouble dans son rapport au nazisme et l’antisémitisme (en particulier dans « Pompes funèbres ») : on trouve des interprétations très divergentes, difficile de savoir où est la vérité…

Il circule en France, en Italie et à travers l’Europe d’avant-guerre en même temps qu’il poursuit une œuvre colossale. Il publie une autobiographie (1932-1940) « Le journal du voleur ». Il dira : « la trahison, le vol et l’homosexualité sont les sujets essentiels de ce livre » et « je me forçais à considérer cette vie misérable comme une nécessité voulue ». Décès en 1986 à Paris dans une chambre d’hôtel sordide.

Comme l’explique Cyrulnik, tous les « voyants psychiques » sont au rouge dès le départ. Je le cite : «Il a le plaisir de la transgression, de l’érotisation du mal ». « Je vous trahis pour me libérer, en prison je m’évaderai par l’écriture ». « Il aime la fange, la violence et la trahison ». 

Genet me semble résilient au sens où son traumatisme -lié à son abandon initial- le conduit à la créativité et l’amène à produire une œuvre considérable, avec parfois une écriture d’une grande beauté pour décrire des situations sordides, mais en même temps non résilient au sens où il n’arrive pas totalement à se reconstruire psychiquement. Son monde de mots ne lui permet pas d’échapper à l’horreur du réel même s’il métamorphose cette horreur dans ses textes : il ne le veut d’ailleurs pas ! Il ne retrouve pas d’équilibre face aux tensions, ni des capacités d’adaptations relationnelles et d’empathie, il reste profondément asocial. 

2 – Le cas Gérard Depardieu

Né en 1948 à Châteauroux. 3ème enfant et 5 frères et sœurs. Le père est tôlier carrossier, compagnon du devoir et sapeur-pompier volontaire. Gérard l’admire beaucoup malgré sa violence. Enfance de misère dans un 2 pièces à Châteauroux. Passe plus de temps dans la rue qu’à l’école. Pratiquement analphabète et à moitié bègue. Il apprendra la lecture plus tard. Son adolescence est faite de « débrouille », de contrebande en tous genres.  Dispensé de service militaire par un psychiatre pour hyperémotivité pathologique. Sur le conseil d’un médecin berrichon, il monte à Paris et s’inscrit à des cours de comédie au TNP.

Bascule dans sa vie à 20 ans à la suite de la perte de son meilleur ami (accident de voiture) : il dévore tous les grands textes classiques, suit une thérapie pour corriger ses défauts d’élocution. Il épouse une fille de polytechnicien en 1970 et découvre le monde de la bourgeoisie. Sa carrière démarre en 1974 avec le film « les valseuses » où il rencontre Patrick Dewaere.

Très instable dans ses convictions religieuses : adhère d’abord à l’Islam (suite à un concert d’une chanteuse égyptienne), puis grand admirateur de St Augustin, et enfin se convertit au Christianisme orthodoxe en 2020. Sa vie privée est tumultueuse. Mort tragique de son fils Guillaume. Grave accident de la route en moto en 1998 (2,5 g d’alcool dans le sang) suivi de 7 autres accidents moto ou scooter ! Quintuple pontage coronarien en 2000. Diverses accusations de viols et d’agressions sexuelles (interviews de lui aux USA qui ont coupé court à sa carrière là-bas) + une mise en examen récente en France.

En résumé, il « mord » dans la vie à pleines dents, sans se soucier d’éventuelles conséquences, pour lui comme pour les autres d’ailleurs.

Son cas est totalement différent de celui de Genet. Sa venue au monde a été problématique puisque sa mère a tenté d’avorter avec des aiguilles à tricoter.  Depardieu dira plus tard qu’ayant survécu à cela, il ne pouvait plus avoir peur de rien, ce que l’avenir confirmera ! Il vit hors de tout cadre affectif parental et éducatif, mais intensément avec ses frères et sœurs, et surtout dehors, en toute liberté. C’était disait-il « une enfance formidable ». Pas de traumatisme initial, mais pas d’accès à la verbalisation des choses et des idées.

*Il n’a donc pas besoin d’une reconstruction psychologique. Sa résilience à lui s’exerce dans la réparation des manques au niveau du langage. La perte de son meilleur ami à 20 ans le conforte dans son idée de maîtriser sa vie, non pas par l’écriture cette fois, mais par la parole grâce à la comédie, au cinéma, au théâtre. Il s’attaque à de nouvelles expériences en permanence pour tout découvrir des hommes et de la vie, pas du tout dans le sens de Genet qui n’arrive pas à entrer dans la vie.

3 – Le cas Romain Gary

Né en 1914 en Lituanie. Son nom est Roman Kacew. Pas de père près de lui. Il vit avec sa mère qui est une figure d’attachement exceptionnelle, un peu tyrannique mais elle lui sacrifie tout pour sa réussite :« tu seras ambassadeur de France, écrivain etc… ». Elle n’est pas possessive au sens où elle ne veut pas les choses pour elle, mais pour lui. Excessivement doué pour les langues : polonais (école), russe, allemand, yiddish chez lui (sa mère est juive), anglais…
Elle lui disait sans cesse « promets le moi » et il promettait.

Ils quittent la Pologne pour la France, à Nice. Romain monte à Paris où il fait des tentatives peu fructueuses d’écriture de nouvelles. Puis intervient la guerre où il s’illustre comme aviateur en Angleterre, et De Gaulle lui remettra la Légion d’honneur. La reconnaissance littéraire lui arrivera à Londres avec « Education européenne ». Puis les succès littéraires s’enchaineront sous le nom de Romain Gary (Gary étant le nom de sa mère) puis sous le pseudonyme plus tard de Emile Ajar, ainsi qu’une carrière d’ambassadeur.

En un mot, tout ce qu’elle voulait pour lui s’est réalisé.

*Son cas est tout à fait différent des deux précédents. Il est en manque de père mais ce n’est pas une perte : il ne l’a pas connu. Il a un cadre normatif et éducatif sévère avec sa mère. Ceci est bien rendu dans son roman autobiographique « La promesse de l’aube ». Cyrulnik estime que l’absence de cadre paternel avait laissé vagabonder son imagination, ce qui aurait été propice à sa créativité. Il est toutefois permis de penser que la quasi-tyrannie maternelle ne le laissait pas beaucoup vagabonder….

Donc pas de traumatisme initial chez Gary. Il doit sa vocation d’écrivain et sa réussite dans la vie à son talent bien sûr et à l’éducation de sa mère qui l’a poussé aux limites. Cela aurait pu ne pas réussir et provoquer un rejet brutal de sa part. Mais cela a au contraire provoqué un amour fusionnel entre eux.  

Il revient à Nice après la guerre pour la voir, alors qu’il est désormais célèbre et qu’il a réalisé tout ce qu’elle souhaitait pour lui. Il apprend qu’elle est décédée depuis 3 ans alors qu’il recevait régulièrement des lettres d’elle. Il découvre qu’elle avait préparé à l’avance 250 lettres qui étaient envoyées post mortem.  Son drame est alors « qu’elle ne saura jamais rien » de cette célébrité qu’elle avait tant souhaitée.

Pour lui, le processus de résilience évoqué par Cyrulnik parait moins évident que dans les deux cas de Genet et Depardieu. L’écriture n’a pas été un acte volontaire pour se reconstruire, mais pour survivre en tant que « migrant » et recréer son vécu, en particulier dans cette relation si forte avec sa mère. Il est difficile de se prononcer sur les traces qu’a pu laisser chez lui la perte de sa mère.

En fin de compte, la résilience n’est peut-être pas le sujet le plus important du livre. Ce que Cyrulnik a surtout développé me semble être la transformation du réel par l’écriture ou par une activité artistique, qui le rend supportable. 

Une discussion s’est intéressé aux personnages longuement évoqués, sur le personnage peu connu de Jean Genet actuellement, sur l’étonnante carrière de G.Depardieux, son amitié avec P. Dewaere, tellement chéri par sa mère Mado Maurin, actrice récemment disparue en 2020. Romain Gary est aussi un sujet d’analyse et dans ce cas aussi, on peut reconnaître le rôle de sa mère tout à fait exceptionnelle. Mères adoratrices, autoritaires et possessives probablement, mais aussi des femmes de caractère. Merci à Louis, l’évocation de personnages connus nous aide encore mieux à comprendre que les traumatismes de l’enfance et l’adolescence sont souvent plurifactoriels.

Francine n’a pas terminé sa lecture, mais Marie veut bien nous parler de Leila Slimani et nous l’écoutons avec grand plaisir.

Marie a choisi « Le parfum des fleurs la nuit » écrit en 2021, Leila Slimani est née en 1981 et elle produit une douzaine de romans tout en travaillant comme journaliste, une plume acérée qui lui a valu dès son deuxième roman « Chanson douce » un prix Goncourt 2016. Elle appartient à une famille importante au Maroc, Père banquier, Mère médecin ORL d’origine alsacienne. Elle vient faire ses études en France, alors que son Père subit un emprisonnement probablement arbitraire. Lycée Fénelon puis Ecole de Commerce enfin, Journaliste à Jeune Afrique.

Le parfum des fleurs la nuit est une sorte d’essai, composé de souvenirs, de réflexions sur sa vie, son expérience d’écrivaine, de journaliste. On lui offre de passer une nuit seule dans un musée de Venise, solitude nécessaire pour écrire au rythme de sa rêverie et du parfum de ce jasmin que son Père appelait « le galant de nuit ». C’est un livre d’une centaine de pages qui reprend ses idées fondamentales : d’où parle-t-elle de France ou du Maroc, mais justement elle est à Venise dans un Palais-musée, hors du monde. Quelle est son identité, sa nationalité de cœur ? et en tant que Femme ? que peut-elle dire pour défendre la liberté acquise en venant en France faire de longues études ? Sa mère lui a appris à s’impliquer dans la société, mais dans un cadre de Santé accessible aux femmes marocaines. Pour elle, la lutte se situe sur d’autres paramètres plus complexes. C’est un livre intéressant dit Marie, accessible, en prise avec les questions actuelles, féminisation difficile de la société en France et au Maroc.  Mais cela demande des forces et de la volonté….

Nicole a préparé un texte après avoir lu un livre américain : « Les chemins de la Rédemption » de Wiley Cash, écrivain de romans policiers, qui a obtenu pour ce roman le prestigieux Gold Dagger Award en 2014. (Poignard d’Or) [Dans le même ordre, on connait Juan Carlos Somosa (La caverne des idées 2000 ; La théorie des cordes,2006) il enseigne à Madrid et s’est formé à la Psychiatrie et la médecine à Cordoue.]

En 155 pages (dans un recueil de Sélection du Reader’digest), j’ai trouvé un roman bien résumé avec des personnages attachants et présentés comme dans le script d’un scénario de film. Deux fillettes, l’ainée, Easter a 13-14 ans environ, la seconde, Ruby 8 ans, sont dans un orphelinat, leur mère est morte et le papa ne peut les reprendre car il a signé un abandon de paternité lorsque son épouse a demandé le divorce. Cet homme n’a pas compris à l’époque, les conséquences de son comportement immature entré sur sa passion pour le Base-Ball qu’il pratique presque professionnellement ; il a du talent et une curieuse façon de mettre son corps en condition pour produire des lancers hors normes. Mais son entourage l’entraîne dans des choix dangereux qui le conduisent à voler ou à se retrouver en prison.

A moment où commence l’histoire, les fillettes se demandent quel avenir elles peuvent espérer ? peut-être vivre avec leurs grands-parents qu’elles ne connaissent pas en Alaska ? Easter a vécu une jeunesse difficile avec une maman souvent critique et amère dans une vie compliquée par l’absence de ce père. Mais qui a dit que toutes les enfances doivent être consacrées aux jeux, aux rires et à la quiétude ? Easter se méfie de son père, sorti récemment de prison, elle craint les regards indiscrets qui la jaugent lorsqu‘elle sort dans la cour de l’orphelinat et sur le terrain de base-ball où elle s’entraine. Elle se méfie aussi des responsables de sa pension qui pourrait prendre des décisions pour sa sœur et elle-même sans leur en parler, elle s’inquiète du rôle des juges et des copains qui l’entourent qui peuvent dire du mal et fausser les décisions à prendre.

Et pourtant, lorsqu’un matin à l’aube, elle entend du bruit à la fenêtre de la chambre, elle se lève et ouvre à son père qui escalade et entre pour les voir, les embrasser peut-être. En fait ses arguments pour leur liberté les persuadent aisément, surtout Ruby qui se jette au cou de Wade. Elles le connaissent peu, mais le mot de « Papa » a ce don assez magique de créer la confiance en elles deux. Ils courent vers une vieille voiture, sans voir qu’un témoin les regarde.

Les débuts de la journée sont un peu chaotiques, surtout parce que Wade, le père, est un sportif, et les mots ne sont pas son « truc », il parle peu. Il y a des zones cachées en lui. Mais Easter les perçoit bien dans leurs grandes lignes, d’ailleurs elle non plus n’a pas les mots pour en parler, et même si elle le pouvait, elle sent que cela ne serait pas adapté à la situation. Ce sont les mots de sa mère qui lui restent dans la tête et Wade en a assez entendu….

Et, il est le seul qui peut faire quelque chose pour elles deux. Très vite elle lui dit qu’elles sont en chemise de nuit, qu’il faut leur trouver des vêtements. Premier arrêt dans cette fuite, mais aussi dans cette première réunion familiale. Elles ont faim, Ruby pleure… les difficultés commencent.

Wade sait que Easter est fine et comprend tout, mais comment l’apprivoiser ? Il comprend que Ruby est encore un grand bébé qui veut s’amuser et échapper aux tristesses de leur vie d’orpheline. Et lui que veut-il ?

Easter est témoin des efforts de son père ; il veut les habiller puisqu’elles sont presque nues. Il souhaite leur faire vivre un moment de liberté sur la plage avec des biscuits, des sodas et des hot-dogs. Et le soir, les vêtements de plage dénotent dans l’hôtel qu’il a choisi avec une piscine. Et il ne faut pas se faire remarquer. Pourquoi ? Easter a remarqué le grand sac dans lequel Wade puise des billets, et alors qu’il est sorti, elle trouve une masse de billets puis referme rapidement. Cela explique pourquoi on fréquente des lieux où l’on peut se perdre dans la foule.

Wade gâte ses filles et ressent de la joie en leur donnant un peu de ce qu’il aurait pu faire autrefois, mais sans argent alors ?… Il se dit que le médiocre travail de nettoyage qu’il a fait ces derniers temps dans la cave d’une maison particulière a été productif. Mais il n’y a pas de hasard, la maison était celle d’un escroc bien connu qui stockait son argent dans ses murs. Et c’est une autre face de sa vie.

Sa cavale actuelle est une sorte de remise en forme de sa vie personnelle, est-ce pour se faire pardonner ?  Il est menacé, bien sûr, poursuivi par la police et le FBI, mais il prend le temps nécessaire pour ses filles, pour apprendre à leur parler ou à les avertir comme il peut, de ce qui les menace. Easter l’a compris et peu à peu, elle entre dans les démarches de pensée de son père : Aller vers ce qu’ils aiment et elle connaît les bases du Base-Ball ; elle intègre peu à peu les choix de son père, ses dons pour le jeu et sa vigilance contre les dangers qu’ils courent tous les trois. Dans cette « road-movies », chaque étape est l’occasion d’une attaque contre Wade ; les toilettes des stations-essence deviennent leurs moyens de rectifier les dégâts vestimentaires et de redonner un semblant de fraicheur à leurs visages. On ne se plaint pas, on masque les bleus et les contusions ; on fait ce qu’il y a à faire, on se cache, on prend la fuite.

Easter devient une aide précieuse, et leurs ennemis ont compris qu’ils forment à eux trois une cellule familiale intelligente et active. Mais ce qu’ils n’ont pas prévu, c’est que les médias et les cinéastes du grand prix de Base-Ball au Busch-stadium de Saint-Louis, filment les spectateurs, les fans venus en foule de partout. Et les cameras s’arrêtent sur le trio, dévoilant leurs positions et les rendant de facto la proie de leurs poursuivants.

Les enfants sont ramenées à l’orphelinat et il est décidé qu’elles iraient chez leurs grands-parents maternels en Alaska. Quant à Wade, pas de nouvelles.

Sauf que, peu après l’arrivée des filles, un gros paquet, énorme, arrive à leur adresse à l’étonnement de tous ; et Easter reconnait l’ours gagné au stand de tir par Wade, pendant leur cavale. Elle se souvient de la masse de billets qu’elle avait mis dans la poche du DOUDOU, à l’insu de Wade. Elle plonge la main dans la poche et tire un billet du Bush-Stadium de Saint louis avec cette indication dactylographiée : « Reste sur tes bases ! ». Easter est rassurée mais reste silencieuse.

Ce livre, ses personnages m’ont beaucoup touchée ; pourquoi à mon âge, suis-je très touchée par ce récit, cette symbiose secrète entre le père et sa fille ? j’ai cru m’être fondue dans le personnage de Easter. Qu’est-ce que cela dit de moi ? de ce que je suis ? ou de ce que j’ai vécu ?

J’ai appris qu’il n’était pas valable de tout ramener à sa personne, pourtant c’est utile de se positionner à certaines périodes de la vie et cela se produit au cours d’un incident, d’une rencontre, ou d’une lecture. Ce questionnement peut être poussé plus avant, et chacun peut le faire facilement.

Peut-être reste -t-il en nous ce qu’on appelle « l’éternel adolescent », ce fond invariant qui subsiste en nous, même à un âge avancé. Est-ce « L’ENFANT » symbolisé en Analyse Transactionnelle par le rire, l’insouciance, la créativité, l’humour ? c’est la respiration qui nous permet d’échapper un moment au personnage de l’ADULTE avec ses raisonnements, ses règles de vie, sa sagesse peut-être. Et d’oublier le rôle de PARENT qui réfère au passé, au vécu et à l’expérience, plus conformiste, plus modélisé par le poids social. En fait le grand message est de vivre dans le présent et de s’adapter souplement aux situations, tout en gardant les valeurs de respect de soi-même et des autres.

Pour le 26 Avril à 14h30, notre prochain Zoom sera centré sur une expérience de discussion autour d’un thème. Je vous suggère de voir le You tube filmé chez MOLLAT dans lequel Boris Cyrulnik  explique son livre  « Des âmes et des Saisons », vous le trouverez facilement. Vous l’écouterez avec attention, relevant les thèmes et ses idées. Nous ferons un échange d’idées et d’opinions pendant un grand moment. Mais cela ne vous empêche pas de lire les livres que vous aimez, ou d’écrire des récits à lire entre nous. Bonne semaine, chers lecteurs et lectrices.

Zoom littéraire de 20h30

Nous retrouvons avec grand plaisir Renée et Marie DO qui souhaite travailler des thèmes philosophiques ou humanistes après une information sur You tube. Elle a du mal à lire des livres, ses yeux, le poids des livres sont peu compatibles avec sa vie en fauteuil roulant. Merci à vous d’être présentes.  (Si vous permettez, nous adopterons un rythme un peu différent, tous les quinze jours. Par ailleurs Renée nous présentera ses lectures quand ses disponibilités le lui permettront. Enfin, Marie Do m’aidera à choisir les You tube qui les intéressent toutes les deux pour le moment.

Marie Do commence par présenter Boris Cyrulnik, même si beaucoup de nos lecteurs le connaissent. Et Renée rappelle quelques livres fondamentaux « Un merveilleux malheur » entre autres. Puis Marie Do aborde les arguments développés dans le livre :« Des Ames et des Saisons. » Sa lecture est précise et très documentée, bravo à elle de nous donner les grandes lignes du livre de 300 pages.
Voici les grandes parties de la démonstration :
1 – Influence du milieu sur l’individu, à travers les sociétés et les époques.
2 – Influence du milieu sur la famille, à travers les âges. 
3 – et actuellement où en est-on ? Il note particulièrement le rôle des femmes en Occident, mais en fait plus largement sur la planète grâce aux transports aériens. Les rôles changent les corps et même les systèmes endocriniens, la sexualité. De même cette évolution modifie la mentalité masculine, surtout si elle se conjugue avec la conscience qu’il faudra bientôt nourrir 7 milliards d’humains sur notre planète.
4 – Comment se situer dans un milieu différent ? Le stress de la surpopulation peut-il nous inquiéter comme il fait pour les Lemmings ? Ces questions rejoignent l’actualité dans cette période de Covid et de volonté de changer nos façons de vivre et de penser le rôle des sociétés dans leur environnement.

Des échanges importants entre Marie DO et Renée, mettent en valeur leurs idées et leur culture. Renée note qu’actuellement nous sommes dans une société du Soin « Care ». Et la résilience est essentielle pour survivre ; et elle a cette phrase remarquable « Faire quelque chose de sa souffrance » sinon on ne peut pas continuer à lutter. Nous sommes bien sur des thèmes fondamentaux de notre société présente : nous savons quelle force et quel dévouement actuellement soutiennent tout le corps médical et infirmier mis à rude épreuve. De même l’acceptation douloureuse de ceux qui perdent des membres de leur famille. Et aussi tous ceux qui ne peuvent pas exercer leurs talents parce qu’ils acceptent les règles destinées à sécuriser la santé de la collectivité. Il faudra bien parler de résilience dans ces cas où l’amertume de la perte de biens, de travail, ou d’êtres chers voudraient s’exprimer en se révoltant contre les règles de santé et de protection qui mettent en péril des pans entiers de nos activités, de nos façons de vivre. C’est ce travail de négociation entre tous ces points de souffrance sociale ou personnelle que nous devons mettre en valeur comme le véritable fondement de la démocratie sociale.

Merci mes amies d’avoir réfléchi à ce niveau.  Vous redonnez du courage et de l’enthousiasme.

Pour le 3 mai à 20h30, Renée suggère de voir sur le site du Collège de France une intervention de Boris Cyrulnik en Pédopsychiatrie : « la biologie de l’attachement ». Elle aura peut-être terminé la lecture de Marguerite Yourcenar « L’œuvre au noir » roman du confinement pendant la Renaissance.

Ou le You tube de Boris Cyrulnik : « Parler de Soi. » 2016 qui pourrait intéresser Marie Do.